A l’est du village de Gençais, commune de Saint-Sulpice-les-Feuilles (Haute-Vienne), une petite vallée courte et profonde descend à l’étang du même nom, en laissant entre elle et le village un petit monticule granitique, nature du sol de cette région qui commence le pays du Limousin. Ce monticule, élevé d’une quinzaine de mètres au-dessus du fond de la vallée et assez escarpé, a été séparé du reste du coteau par une coupure d’environ 10 m de large sur 8 m de profondeur, qui sert de fossé à la petite montagne dont le sommet a été aplani pour recevoir le château dont les murailles couronnent les bords des escarpements, et dont le reste est enfoui sous les broussailles et les arbres, et nous représente à peu près un carré dont un côté est en ligne brisée, pour s’accommoder probablement à la configuration du terrain. Chaque angle est défendu par une tour, plus une autre sur le devant sur la coupure, pour protéger, avec la tour angulaire voisine, la porte qui devait se trouver en cet endroit et être munie d’un pont-levis.
L’épaisseur de ces murailles, tant de l’enceinte que des tours, est de 2,20 m. Les tours ont 4,40 m. de diamètre intérieur, et avec leurs murs 8,80 m de diamètre extérieur.
Dans la cour, on rencontre un bâtiment de 16 m de long sur 1,50 m. de large, qui est adossé au mur en ligne brisée, et qui parait avoir été destiné à des logements ; à peu près dans le milieu, et isolée de toutes parts, est une grande tour ronde, ou donjon, qui était la principale et la plus forte construction de tout le château ; elle mesure 10 m de diamètre extérieur et 3 m à l’intérieur. Je n’ai pu avoir de détails sur la hauteur, la disposition de l’entrée et la distribution intérieure ; de même que pour tout l’édifice, les écrits manquent et la tradition fait défaut.
Les habitants disent qu’eux et leurs ancêtres ont toujours vu les choses dans l’état où elles sont, ce qui annonce qu’il y a longtemps que le château est en ruine, et que, par conséquent, il doit remonter à une assez haute antiquité ; je serais même tenté d’en attribuer la fondation aux Romains, lorsque César distribua sur cette ligne la 12ème légion dans des petits forts détachés pour maintenir le pays dans l’obéissance. Ce n’est pas qu’il soit d’architecture romaine, mais la féodalité en aura profité pour le reconstruire et se l’approprier.
Vers l’angle N.-0., on voit l’entrée d’un boyau fortement incliné, voûté en ogive et passant sous la tour, comme pour offrir une issue et descendre dans la vallée.
Les broussailles et les éboulements ne permettent pas de voir si les murs commencent au bas du monticule, ou seulement à une certaine hauteur ; on ne les voit bien que dans les endroits où ils dépassent le sol de 2 ou 3 m. La longueur du château est d’environ 37 m, et sa largeur de 25 m.
La Salle de Gençais, l’étang, la métairie et la forêt du même nom appartenaient en 1303 à Jacques de la Porte. Plus tard, nous les trouvons formant un fief dépendant de Rhodes et relevant de Brosse ; il s’affermait en 1718, avec celui de Lavaupot, 2 000 livres, et possédait moyenne et basse justice, ce qui montre que, malgré sa grande force de défense, le château de Gençais n’a jamais été un fief puissant ; cependant sa construction me le fait ranger parmi les châteaux seigneuriaux, ainsi que le suivant, qui, situé sur la même rivière, a avec lui la plus grande analogie. De temps immémorial, le fief de la Salle a appartenu à des membres de la famille Pot de Rhodes, en a partagé le sort et a fini par être vendu en détail.
Le coteau d’en face, de l’autre côté de l’étang, porte le nom de coteau de la Salle, et est remarquable par ses nombreuses tombelles dont nous avons parlé (1ère partie, art. Tombelles).