2 m. , 7 h.
C’était le chef-lieu d’ une petite châtellenie qui comprenait la partie de la paroisse de Lussac située sur la rive gauche de l’Asse.
Il y a tout lieu de croire qu’elle n’était qu’un dénombrement de la seigneurie de Lussac constitué au profit d’un puîné ; nous le ferions volontiers remonter à Amiel de La Trémoille, mort en 1257 ; nous savons que sa fille Agathe épousa Guillaume de Lezay, seigneur d’Angles, qui, en 1245, paye 15 l de rachat à Alphonse de Poitiers pour le fief de Lussac-les-Eglises (de feodo Lucac Ecclesiarum) appartenant à sa femme*.
* Arch. hist du Poitou, t. IV, p. 100.
Nons voyons ensuite, le 8 juillet 1333, Hugues de Lezai donner à l’abbaye de La Colombe une rente de 10 s. qu’il assigne sur sa terre de Lussazeis : il ne peut s’agir ici de la Seigneurie de Lussac qui appartient alors aux La Trémoille et il est fort probable que cette terre soit le Fief Lussazois que nous trouvons au commencement du XVe siècle entre les mains de la famille de Magnac.
Les archives de Lussac contiennent un curieux terrier de cette seigneurie rédigé en 1413, d’après un grand registre antique ; on y trouve énuméré tous les droits de cette châtellenie :
“ Ce sont les cens, rentes et revenues qui appartiennent et sont dehues, tant en blé comme en deniers, à noble et puissant seigneur messire Jehan de Maignac, chevalier, seigneur du Soulier, du Fiefz, de Malcornay, de Saint-Prier et de Chanteloube, à cause desd. terres, faites et ordonnées toutes par nottes reçuez par moy Philippot Cauderouer, clerc et nottaire juré de la Basse-Marche, et escriptes l’an mil CCCC et trèze.
“ Premièrement s’ensuit les cens, rentes et revenues de la terre du Fief : le 5e jour de février de 1412 (v. s.), Jehan de la Chassaigne, pour le lieu Boutet au village des Cloudures, avec la fundanseignourie dud. lieu ; il doit conduire le blé du seigneur en son hôtel du Soulier ; il confesse estre homme dud. chevalier par la forme et. manière que les autres hommes du Fiefz ont accoustumé à estre. ” Des droits sont dûs pour fouage*, d’autres pour chinage**. Suivent les autres déclarations des hommes du Fief.
* Fouage, droit dû à raison du feu, de la maison.
** Dans l’aveu de 1561, on dit que le seigneur peut prendre sur chacun tenant feu en sa terre, 2 d. pour le droit de chinage. Le chinage ou chemage était un droit qui se payait à raison des charrettes qui passaient dans un bois ; d’une façon plus générale, c’était une redevance pour un chemin, un passage.
“ Sur tous les habitants dud. Fié tenant feu et lieu, sur chacun ung boisseau d’avoyne, à la mesure du Fié, à cause du feure* Machigon.
“ Item si en la dite terre du Fié avoir cent feulx ou plus chacun seroit tenus de paier par raison du feu, tous les ans à chacune feste de N.-D. d’aoust, une émule de froment et 14 quartes d’avoine, mesure dud. Fié, et une géline et 2 deniers de chinage chacun an en chacune feste de Nouel et les autres cens, rantes, charges et devoirs antiens qui sont dûs sur les tenues de lad. terre.
“ Item tous les manans et habitans de lad. terre tenant feu et lieu doyvent chacun tous les ans aud. chevalier une journée pour faucher ou pour mestiver ou pour fouire ou pour cloire les vergiers ou pour faire quelque chose que l’on leur vouldra commender.
« Item tous les dessusdits habitants doyvent chacun an, chacun ung bian pour aler quérir le vin dud. Seigneur soit en Berri ou en Poytou ou là led. seigneur aura soit vin pour son hostel et lou amener en l’ostel dud. seigneur.
“ Item la tierce partie à seigneur de la disme de tous les blés croyssans en et partout les villages des Cloudures, de la Vouzelle, de la Foucaudière et de la Villate et la tierce partie de la disme des gélines et les agriers.
“ Item à mond. seigneur les deux parties de la disme de tous blés et de tous vins croyssans en et partout les villages des Cloudures et de la Foucaudière que souloit tenir et estre au sires de Mailhous et les deux parties de la disme de gélines, des aigneaulx et des lanez.
« Item à mond. seigneur la moytié de la disme de tous les blez croissans en et partout, les villages de Bourdelles et de Mons et la moitié de la disme des gélines.
“ Item à mond. seigneur de la tierce partie des lanes des aigneaulx et des prémisses en et partout les villages dessus nommés.
“ Item la justice haulte, basse et moyenne en et partout lad. terre du Fié et le boys appelé le Boys du Brueilh-Boffi
assis en lad. terre avecques la justice durant partout led. boys.
“ Item à mond. seigneur la disme des vins croissans en et partout lad. terre si les vignes y estoyent.
“ Item à mond. seigneur les vandes de toutes et chascunes les bestes vendues eu lad. terre et de toutes autres choses de quoy vendez se doyvent payer.
“ Item à mond. seigneur les feures de seigle cinq quartes et d’avoyne cinq quartes.
“ ltem à mond. seigneur le moulin du Fié assis en lad. terre avec les mosnans, c’est assavoir tous les habitans de lad. terre aussi avecques la justice comme dessus. ”
(Parchemin de 15 feuillets ; à la suite, on trouve les rentes de la terre du Soulier ; la fin manque)
Guillaume de Magnac laissa Marguerite, mariée à Guillaume de Vouhet. Par lettres du 1er sept. 1417, “ Guy de Besançon, lieutenant général de très haut et puissant prince M. Loys, conte palatin du Rin, duc en Bavière et comte de Mortaing, aiant le bail, gouvernement et administration de Loys de Bavière, monseigneur son filz, seigneur de la Basse-Marche et de Belac, Rancon et Champaignac, met en souffrance messire Guillaume de Voyec pour la foi et hommage de son lieu du Soulier et de sa terre des Fiefs, tenus dud. seigneur à cause de son châtel du Dorat ”, pour une durée d’un an et mande à ses officiers de ne pas le molester pendant ce temps.
En l’an 1439, Marguerite de Magnac fit procéder à un nouveau terrier par Pierre Desperelles, bachelier en droit canon et civil, et Jean de Fontbuffeau le jeune, clercs jurés et notaires du bailliage de Limoges.
Le 25 juin 1444, Bernard d’Armagnac, comte de la Marche, reçoit l’hommage du lieu du Fieu Lusayzes, fait par Georges de Voet, au nom de Marguerite de Magnac, sa mère.
En 1451-1452, Georges de Vouhet procède à plusieurs arrentements dans le mas du bois du Breuilh, joignant le ruisseau de Bordebonne.
Pierre de Vouhet, seigneur du Fief et de Boubon, sans doute son fils, rend aveu, le 24 mai 1488, à Pierre, duc de Bourbon, comte de la Marche, pair et chambellan de France pour le Fief.
Le 31 août 1506, le même bailla un dénombrement à Anne de France, duchesse de Bourdonnoys, pour sa terre et seigneurie du Fyé avec tout droit de justice, relevant à foi et hommage lige au service de féaulté. Elle comprend un moulin auquel sont mosnant tous les habitants de la seigneurie, une métairie à 4 bœufs, des rentes, 16 bians et 16 vinades avec 4 bœufs et charrette.
Pierre avait épousé Marie de Razect, qui, veuve, avouait, pour ses enfants mineurs, le 17 avril 1517.
Son fils, René de Vouhet, seigneur du Fief et Boubon, réunit en terrier, en 1526, les déclarations rendues par ses tenanciers le 28 mars 1539, il donne un dénombrement pour le Fief Lusausoys ; de sa femme, Jeanne de Bersolles, il laissa Claude de Vouhet. On trouve un aveu au nom de celui-ci le 18 nov. 1261. A sa mort, cette seigneurie devint indivise entre Antoine de Vouhet, seigneur de Bonbon ; Charlotte, sa sœur, femme de Georges de La Trémoille, seigneur de La Bruière et Antoine de Vouhet, seigneur de La Galhardière, leur oncle. De 1575 à 1604, ceux-ci cédèrent leurs parts au seigneur de L’Age-Bernard, qui devint seul possesseur du Fief.
Le 30 sept. 1614, René Lignaud, seigneur de bissac et de l’Age-Bernard, vend à Pierre et Joseph Aubugeois, bourgeois de Magnac, le fief, seigneurie et châtellenie du Fief Lussasois, moyennant 15000 l. Le 8 fév. 1633, Joseph Aubugeois, seigneur châtelain du Fief, fait arpenter le village des Cloutures.
Le Fief fut ensuite rétrocédé aux Lignaud le 25 fév. 1640 par Joseph Aubugeois, seigneur des Pellauderies, Isaac Aubugeois, notaire, et François Aubugeois, moyennant 17300 l. Préalablement, Lignaud avait obtenu du roi, par lettres patentes du 13 nov. 1639, en considération de ses bons services, donation et remise de tous les droits dûs à cause de cette acquisition. Jusqu’à la Révolution, le Fief resta annexé à la seigneurie de Lussac.
La seigneurie du Fief nommait juge, procureur et greffier ; en 1688, les assises se tenaient à La Trigalle niais au XVIIIe siècle comme nous l’avons dit plus haut, la justice se rendait au bourg de Lussac dans un lieu dit des Vallentins, faisant partie de la châtellenie du Fief.
Le moulin du Fief était en ruines en 1610 ; à cette époque, Lignaud y fit mettre “ une meule et ung chail neufs ”.