Famille Decressac

Du mariage de Louise Quéraud avec Jean Decressac nait un fils Eugène Decressac le 10.12.1860.

De 1875 à 1879, Eugène Decressac, fait des études au Petit Séminaire du Dorat.
En 1879, il est reçu bachelier. Il part à Angoulême pour y faire son volontariat dans le 21e Régiment d’Artillerie (service militaire en un an au lieu de trois, destiné à former des gradés). Libéré, il commence ses études à Limoges.
En 1884, reçu à l’externat en 2e année, il tente avec succès le concours de l’externat de Paris puisque Limoges n’a pas de faculté.
Il débute dans le service de VULPIAN à l’Hôtel Dieu puis chez DUPLAY à Lariboisière.
En octobre 1886, il est admis à l’internat 22e sur 52 reçus. Il obtient une place à TENON chez Roques puis à Lariboisière chez PEYROT.
En 1889, il est interne dans le service du Professeur PEAN à Saint-Louis. Sa thèse : « Contribution à la chirurgie du cerveau basée sur la connaissance des localisations », fait date dans les annales de la chirurgie du cerveau et vaut à son auteur une médaille de bronze.
En 1890 il s’installe à Angoulême comme médecin chirurgien.
En 1891 il est nommé chirurgien de l’Hôtel Dieu. Désigné successivement Médecin des Épidémies, Vice Président de la commission d’Hygiène, Médecin de la Poudrerie.
Le 5 novembre 1912, le Dr Gautruche, ancien interne des hôpitaux de Paris, accepte de venir à Angoulême remplacer le Dr Decressac qui se sent obligé d’accepter encore quelques charges, telle la Présidence de la Croix-Rouge.
A Pâques 1914, il assiste au Congrès d’Hélio-Thalassothérapie sur la côte d’Azur où il est invité à la réception donnée par le Prince de Monaco.
A la mobilisation de 1914, à plus de 53 ans, M. Decressac, pourtant dégagé des obligations militaires, reste à la disposition du Commandement. Il est nommé Médecin Chef d’un important Centre Chirurgical prévu à l’École Normale Professionnelle de garçons. Très vite, il initie ses deux fils jumeaux Jean et Georges, à la vie hospitalière (visite dans les salles et présence aux opérations).
Ainsi le 28 août 1914 :

« Le premier convoi de blessés destiné à Angoulême est annoncé. Tous les Médecins Chefs des divers hôpitaux de la ville se rendent à la gare pour s’occuper du débarquement, de la répartition et du transport des blessés. Quelle émotion de voir ce long train de marchandises, aux wagons garnis de paille, remplis de soldats munis de pansements variés. Certains sont étendus l’œil et le visage fiévreux, certains geignent et il faut les remuer avec des précautions infinies, certains, moyens et petits blessés, sont assis courageux et fiers… Très nombreux sont ceux qui avouent n’avoir jamais vu le boche… (invisible avec son costume feldgrau). Après la bataille de la Marne, les trains se succèdent à un rythme accru… Et les plaies ne sont pas belles, la plupart suppurent… Les pansements n’ont pas été renouvelés depuis dix jours… Et déjà des titaniques… Des salles spéciales leurs sont réservées… Très pénible vision… Le corps médical se multiplie pour donner à chacun les soins nécessaires… Et malgré la pauvreté, des traitements de l’époque, on parvient à sauver un certain nombre de tétaniques !! La salle d’opération fonctionne sans arrêt… Les sutures, les amputations, les « épluchages » des plaies, les extractions d’éclats d’obus ou de schrapnelles, ou de balles… Que de plaies affreuses profondes, infectées ou même gangrenées… dont l’affreuse odeur donne la nausée… Le Dr Decressac cautérise, irrigue… s’acharne à conserver un membre bien compromis. Que de fois devant un blessé porteur d’une fiche « à amputer d’urgence » le Dr secouait doucement la tête… « Non, nous n’amputons pas… Pas de suite du moins… Il faut essayer de vous le conserver » et il sauvait le membre, presque toujours. Assez rapidement l’arrivée des blessés n’a plus lieu que la nuit… Probablement afin de ne pas impressionner la population… Mais quelle fatigue supplémentaire.
En octobre 1914 arrivent à l’Hôpital les premiers blessés Allemands. Un d’entre eux est particulièrement touché, une jambe broyée avec gangrène et… asticots… Un autre a le crâne farci d’obus. Ils sont traités et soignés avec succès. Ils sont reconnaissants de ce qu’on fait pour eux. »

Le 28 décembre 1915, les jumeaux Decressac devançant l’appel et sont incorporés au Quartier du 52e Régiment d’Artillerie de Campagne à Angoulême.
Le 10 mai 1916, Jean Decressac est blessé à Verdun et il sera cité le 26 février 1917 à l’ordre de la Brigade du 12e corps sous le Numéro d’Ordre 59

« Le Brigadier Decressac Jean, première batterie du 52e R.A.C, le 10 mai 1916, à Verdun, commandant une corvée de nuit, a eu la majeure partie de son personnel mis hors de combat par le feu de l’artillerie lourde ennemie. Blessé lui-même, il n’a proféré aucune plainte, utilisant ses connaissances médicales pour panser ses hommes. Il n’a consenti à se laisser soigner que lorsque tous les canonniers de sa corvée ont eu reçu les soins les plus urgents.
                                          21 février 1917
.                                           Signé : LEPELLETIER
                                          Général Commandant d’Artillerie »

Le 11 avril 1917 Georges Decressac part à Fontainebleau à l’école des officiers,
Le 7 juin 1917, son frère Jean l’y rejoint .
Le 14 juillet 1917, leur père, Eugène Decressac, est nommé Chevalier de la Légion d’Honneur.
En août 1917, Georges part pour le front d’Orient où il reste 18 mois sans permission.
Le 30 décembre de la même année, il est nommé Sous-lieutenant. Georges est présent lors de l’entrée des armées en Roumanie.
Le 30 novembre 1918, il connait l’apothéose à Bucarest  puisqu’il a l’honneur de faire entrer la 1re Batterie du 19e, devant le Roi, la Reine, le Général Berthelot, le Prince Carol.
En 1918 le jour du Vendredi Saint, Mme Eugène Decressac, alors à Paris note : « En ce Saint-jour, un obus est tombé sur l’Église Saint-Gervais, remplie de fidèles… Horrible carnage. Une autre catastrophe, le dépôt de munitions de la Courneuve saute… »
Le 18 mars 1918, Jean Decressac est nommé Sous-lieutenant. En avril il se dirige vers les Vosges après avoir vécu de durs combats dans le secteur du Chemin-des-Dames.
Le 25 octobre, il sera cité à l’ordre de la Division (étoile d’argent). «Officier très énergique, a toujours fait preuve d’un courage et d’un sang-froid remarquable. S’est particulièrement distingué pendant la période difficile du 5 au 17 septembre 1918, où il a conduit d’une façon parfaite les tirs de sa batterie sous des bombardements violents ».
Le 31 octobre au Journal Officiel, Eugène Decressac obtient son 3e galon de Capitaine.
Le 2 novembre 1918, l’armistice est signé avec l’Autriche, le 10 novembre le Kaiser Guillaume II abdique. Enfin, c’est le 11 novembre date à jamais mémorable de l’armistice avec l’Allemagne.

« Dans la clairière de Rethondes (forêt de Compiègne) la délégation Allemande d’Armistice présidée par ERZBERGER, avec le Général Von WINTERFELDT, le Comte OBERNDORFF et le capitaine de vaisseau VANSELOW s’incline vaincue devant :
.   Le Maréchal FOCH
.   Le Général WEYGAND
.   Le Commandant RIEDINGER
.   Le Capitaine de MIERRY
.   L’Officier interprète LAPERCHE
Et devant les britanniques :
.   Amiral WEMYSS
.   Contre-Amiral HOPE
.   Capitaine de vaisseau MARRIOT
.   Interprète Commander BAGGOT
Les Etats-Unis « associés » et non « alliés » ne sont pas représentés ».

Le 12 novembre 1918 : Ordre du Jour du Maréchal Foch.

« Officiers, sous-officiers, soldats des armées alliées.
Après avoir résolument arrêté l’ennemi, vous l’avez, pendant des mois, avec une foi et une énergie inlassables, attaqué sans répit.
Vous avez gagné la plus grande bataille de l’histoire et sauvé la cause la plus sacrée : la liberté du monde. Soyez fiers.
D’une gloire immortelle vous avez paré vos drapeaux. La postérité vous garde sa reconnaissance. »

A la fin des hostilités les jumeaux sont tous les deux décorés de la Croix de Guerre. Très vite, ils reprennent leurs études de médecine. Jean prend la succession de son père tandis que Georges s’installe à Mouthiers.

Après le décès de son mari en 1926 Mme Eugène Decressac, née Catherine Darms s’occupe d’œuvres sociales. Elle a été reçue trois fois en audience par le Pape Pie XI en 1935. Dans son journal en 1939 elle écrit « Les Chézeaux reçoivent une masse de réfugiés. C’est tout un village de Lorrains avec leurs prêtres et leurs religieuses ».

S’inspirant de leurs aïeux beaucoup de descendants ont à leur tour pris la carrière médicale ainsi :

Le Dr Bernard Decressac à Angoulême fils du Dr Jean Decressac.
Le Dr Pigot, chirurgien-dentiste, gendre de M. Jean Decressac.
Le Dr Patrice De La Barre, petit-fils de M. Jean Decressac.
M. Bernard Bouffard, petit-fils de M. Jean Decressac est actuellement en 4e année de médecine.
M. Luc Virlet, aussi petit-fils de M. Jean Decressac est en 3c année de médecine.
Les autres gendres de M. Decressac ont tous des fonctions importantes :
M. Jacques De La Barre, décédé accidentellement en 1963, était ingénieur.
M. François Virlet, Polytechnicien a un poste de responsabilité dans des usines textiles du Nord.
M. Alain De La Barre est Directeur Commercial à la Compagnie Générale des Eaux.
M. Marcel Lagneau est responsable du personnel à la Société Roussel.
M. Henri Bouffard est ingénieur chez Michelin.

La famille Decressac a gardé de profondes attaches aux Grands-Chézeaux et en août 1985, une réunion de famille rassemblait 75 personnes dans la maison familiale appartenant désormais à M. et Mme Bouffard. L’ancienne grange est actuellement le lieu d’une construction surprenante mais surtout passionnante : la famille Bouffard a commencé la construction dans son ensemble d’un orgue.