Château composé d’un corps de logis avec une grande tour, chapelle et grand bâtiment , le tout menaçant ruines ;
3 m. et un moulin en 1745
7 m. 22 h.
Pendant plus de trois siècles cette seigneurie, qui relevait de Magnac, a été possédée par la famille Barthon de Montbas, une des plus illustres de notre pays, encore représentée de nos jours.
Son origine n’a point encore été débrouillée d’une façon certaine : un inventaire du XVIIIe siècle mentionne le contrat de mariage passé le 5 juin 1380, en la cour de Moulins, de Jean Barthon, chevalier, seigneur de Lubignac, chancelier du Dauphiné et de la Marche, fils aîné de Roland, vicomte de Montbas, et de Louise de Salaignac, avec Berthe de Bonat. Puis les généalogistes chargent ce Jean des dignités suivantes : chancelier du Dauphiné, 1439, chancelier du grand sénéchal de Lanes, secrétaire de Jacques, roi de Hongrie, lieutenant général de la Basse-Marche, 1437, garde des sceaux de la baillie de Limoges, 1446-1449 chancelier du comté de la Marche, 1453, et du Limousin, conseiller du roi et premier président du parlement de Bordeaux. Or, un acte authentique de 1455 le dit septuagénaire ; par suite, ou le contrat de 1380 ne le concerne pas ou la date est fausse. On peut aussi supposer que toutes ces charges n’ont pas reposé sur la même tête et qu’ il y a deux Jean Barton, le père et le fils ; les titres nous manquent pour nous prononcer.
Le document le plus ancien que possède encore M. le comte de Montbas est un partage du 3 déc. 1455. On remarquera que dans cet acte, dont nous transcrivons le préambule fort curieux, Jean Barton ne porte que le titre de seigneur de Lubignac.
Jean Barton, chevalier, seigneur de Lubignac, conseiller du roi, chambellan du Dauphiné et de la Marche, expose par devant Jacques de Marcillac, notaire juré,
« Que comme il soit ainsi que DIEU nostre créateur et largiteur de tous bien luy eust donné dez graces plus largement que ne pourroyt, ny ne scauroit déffinir tant en biens de nature de fortune, que de grâce, et bien recognoissant tout lesd. Biens luy estre venus par don de Dieu et ayant recours à sa benoicte miséricorde, luy requérant vray pardon de ses faultes et très humblement le merciant des biens et des grâces à luy données, dits et proufféra en effet les paroles qui s’ensuyvent : que par ce que dès longtemps voyant son aage estre jà septuagénaire, pensant que il fauloit payer le devoir de nature et que de sa plus loingue durée,
Il n’est pas grant espérance et voulant pourvoir à sa puissance, que morust comme vray catholicque en bonne recognoissance de Dieu et de ses biens faitz et pour vouloir laisser paix et union entre ses enfants et héritiers et affin que par ses biens délaissés entre eulx ne puissent sortir question ne débat et dont inconvéniant, que Dieu ne veulhe, s’en peust ensuyr. Et affin que paix et amour puisse estre guardée et entretenue entre ses enfants, leur en avons bailhé la doctrine et pour estre mieulx moriginés, à grands fraiz et despenses, des biens que Dieu de sa grâce lui avoit donnés, les avoint entretenuz aulx escolles et estudes jusques à perfection, tous licenciés, et despuys, ainsi que par eulx avoit esté advisé, les aucunz avoient mis et dédiés au service de Dieu et de l’église et les autres ordonnés estre au siècle et leur succéder ès biens temporelz que Dieu, de sa grâce, leur avoit donnés »
On voit par cet acte que ces enfants sont : Jean Barton, doyen de Limoges, abbé du Dorat, archidiacre de Constantin, conseiller du roi au parlement de Paris, président aux enquêtes ; frère Etienne Barton, prieur du Cluys et prévot de Tulle ; Pierre Barton, seigneur du Deffens, conseiller du roi ; Jacques, archidiacre de Bruyères et chantre du Dorat ; Mathurin, général conseiller du roi en la chambre des aides, seigneur de Bouablon ; Philippe, archidiacre de Thouars et archiprêtre d’Anzesme, tous licenciés ès-lois ou en décret. Il avait eu deux filles Catherine, mariée à Mathelin Bonnichaud, seigneur de Grasse Vaul, et Antoinette, épouse de Guillaume de Vic, seigneur de Toz et de Colombes, conseiller au Parlement ; la première était décédée avant lui laissant Marguerite mariée à Antoine Allart, secrétaire du comte de la Marche, et Berthe alliée à Jean de Perpenolle, fils du seigneur de Aulte Faye.
Jean Jacques et Philippe reçoivent chacun 3oo l. de rente ; Mathurin prend l’hôtel situé à Paris et les meubles qui s’y trouvent ainsi que Bouablon. Pierre conservera le surplus “ tant pour son partage que pour son esnéage que aussi les services faitz à sesd. père et mère et frère ”. (P.M.).
Pierre Barton, chancelier de la Marche en 1467-1481, mourut le 26 mars 1491 ; sa femme, Perrette Lefevre, fut inhumée en 1499 dans la chapelle du prieuré de Vitrat.
Son fils, Bernard Barton, viconte de Montbas, seigneur de Lubignac, épousa en premières noces Françoise Trousseau, petite-tille de Jacques Cœur, et en secondes Marie de Seuilly.
Celle ci fut enterrée dans la chapelle de Lubignac qu’elle avait probablement fondée. En 1528, elle avait établie la vicairie du château de Montbas.
Le 10 nov. 1509 Bernard abandonna toutes ses terres à son fils, à l’occasion du mariage de celui-ci avec Isabeau de Levis.
Pierre Barton fut d’abord connu sous le nom de Lubignac ; il se trouva au voyage du roi contre les Vénitiens en 1509, et à celui de Picardie en 1513. Son château de Montbas fut incendié et pillé en 1544, sans doute par un détachement de la bande de gascons dont nous avons signalé plus haut le passage à Arnac.
Il eut pour enfants : Guillaume, évêque de Lectoure, député des Etats de France au concile de Trente ; François, prieur de Vitrac en 1546 ; Gilberte, abbesse de Cusset, et Pierre qui suit.
Pierre Barton, étant tombé malade à Saint-Germain-des-Prés, dicta son testament le 30 juil. 1556:
Il veut être inhumé dans la chapelle Saint-Jean de Guéret, “ tout razibus de sa femme et qu’à cette place il soit faict un monument de la hauteur de celuy de Fay ou deux doigts plus haut et soit faict une tombe de cuivre, en laquelle tumbe icelluy testateur et la dicte feue dame de Levis, sa femme, seront inscultés (sic) avecq chascun leurs armoiries soubz leurs pieds et une escripture portant ces mots :Cy-gist noble et puissant seigneur messire Pierre Berthon, chevallier, jadiz seigneur vicomte de Mont bas , seigneur du De//ens, de Lubignac, de Fayolles et de Fay près Némoux, qui trespassa le… Cy-gist aussy noble dame Ysabeau de Leuys dicte de Chasteaumorant, femme du dict messire Pierre Barthon, qui trespassa le vingt troisisme jour de mars l’an mil cinq cens quarante sept ”.
Il veut aussi que « au chevet de la pierre ou à quelques costé des douelles qui soustiendront lad. tombe de cuivre soit mys ung petit escripteau de cuyvre faisant mention de la mort de messire Jehan Barthon et ung aultre de messire Pierre Berthon et ung aultre de messire Bernard Barthon, tous chevalliers, qui tenoient lesd. terres et seigneuries dont cy-dessus est faicte mention et soyent mys les jours et ans de leurs trespas « . On prendra le cout du monument sur les 1500 l. qu’il s’est réservé sur les terres de Fayolles et de Lubignac en les donnant à son fils.
« Item, et pour ce que de tout temps led. testateur a eu singulière dévotion à la Vierge Marie, à madame Sainte-Catherine, à M. Saint-Jean-Baptiste, et à madame Sainte-Marguerite, dont les images sont dans sa chapelle de Lubignac et aussi pour ce que feue dame Marie de Sully, mère d’icelluy testateur, qui y est enterrée, à laquelle icelluy testateur dict estre grandement tenu, tant pour la terre du Deffens que aussi qu’il a craincte de n’avoir pas bien faict tout ce qu’il estoit tenu de faire pour elle, veult et ordonne que sur les 1500 l. il soit fondé en la dicte chapelle quatre messes toutes les semaines, sçavoir est le jour de sabmedi de nostre Dame, le lundi de sainte Catherine, et veult que messire Antoine Bonnet, son presbtre, die lesd. deux messes et que il en soit vicaire, et le mercredi une messe de Saint-Jean laquelle est ordonnée estre dicte par messire Julien Laurenson, filz de Bernard Laurenson, qui a esté son mestayer de Lubignac l’espace de six vingtz ans (sic) et l’aultre messe de Sainte-Marguerite le jeudi ; veult qu’elle soit dicte par messire Jehan fils de Thony Biret et veult que en la fin desd. messes soit dicte l’absolution avec de profundis et les collectes Deus in cujus miserationis inclina et fidelium « .
Il assigna les deux premières sur les moulins, la troisième sur la métairie du château de Lubignac et la dernière sur la métairie de Masbonneau ; les revenus de chacune d’elles seront de 4 s. seigle et 50 sous. Ces vicairies seront ensuite à la présentation de l’évêque de Limoges. Les deux premières messes pourront à l’avenir ne faire qu’une seule vicairie.
Il veut que son cœur soit apporté dans la chapelle de Lubignac où est déjà celui de se femme et qu’il y soit mis un escriteau de cuivre faisant mention de ce. Enfin ses enfants devront envoyer un prêtre ou homme de religion à Saint-Jacques en Galice pour accomplir un vœu fait par lui et sa femme. (P. M.).
Nous trouvons ensuite comme seigneurs de Lubignac :
– Pierre Barton, lieutenant général, enterré au Dorat en 1598.
– François, gentilhomme de la chambre du roi ; sa femme, Diane de Bonneval, habitait Lubignac en 1593.
– Pierre Barton, capitaine de 100 chevau-légers, grand maître des eaux et forêts de Normandie ; Jean, dit le comte de Montbas, à qui nous avons consacré un article biographique, était son fils, comme le suivant.
– François Barton, page du cardinal Richelieu, maréchal de camp, lieutenant général, reçut de nombreuses blessures à Lens et à Rocroy ; “ il mourut illustré par toutes ses vertus, mais surtout par sa charité envers les pauvre ”.
– Pierre Barton, comte de Montbas, mousquetaire de la première compagnie, qui, en 1732, vendit Lubignac au comte de Laval.
Cette seigneurie était encore aux mains des descendants de ce dernier lors de la Révolution. Le domaine de Lubignac possédé ensuite par le duc de Montmorency-Laval, pair de France, lieutenant général, décédé en 1817, puis par son fils, ambassadeur à Madrid, a été aliéné par les héritiers de ce dernier.
Le 5 mai 1727 le seigneur de Lubignac donne à bail à André Beynot, teinturier et foulon, la maillerie et moulin à drap de Lubignac ; Beynot pourra reprendre ses presses et ses landes qui servent à presser et à faire sécher. En 1734 il y avait à la fois moulin à blé, à huile et à drap.
La tour de Lubignac, qui existe encore, est un des rares vestiges de l’architecture militaire de notre pays. Elle profile sa masse dans un site assez sauvage, au fond d’une vallée, sur les bords de la Brame, qui autrefois s’étalait en un vaste étang au pied du château.
Ce château, d’après un plan dressé par M. Grignard, avait la forme d’un carré parfait, flanqué aux angles Nord, Ouest et Sud de tours rondes ; la dernière, la plus importante, est celle qui subsiste ; dans l’angle Est se trouvait la chapelle mentionnée en 1477.
Cette tour, à base légèrement conique, servait de donjon; on y entrait par un pont-levis qui, abaissé, venait reposer sur un massif en maçonnerie aujourd’hui détruit auquel sans doute on accédait par un escalier, comme à Bridiers. Ce pont-levis s’appuyait pour rouler sur deux corbeaux en saillie sur les deux jambages de la porte et creusés de gouttières pour recevoir les axes. Relevé, il s’encastrait dans la muraille et servait de porte ; une seconde porte le doublait en arrière; elle était consolidée par une barre de bois glissant dans une rainure.
Ces deux portes franchies, on trouve à droite un escalier en spirale qui conduit aux étages supérieurs et à gauche des degrés qui descendent aux caves voûtées. Au fond, une porte donne accès à une grande salle carrée munie de nombreuses cachettes. A l’intérieur tous les plafonds, toutes les voûtes sont tombées.
On voit ainsi que cette tour était divisée en trois étages dont le dernier seul était voûté. Celui-ci était divisé en deux travées couvertes par des voûtes à nervures; aux retombées des arcs, se trouvent figurés des personnages à mi-corps soutenant des deux mains les chapiteaux d’où partaient ces arcs.
Des cheminées monumentales, dont les manteaux manquent, réchauffaient chaque étage. Ceux-ci étaient éclairés par des fenêtres munies de banquettes et allant en diminuant de l’intérieur à l’extérieur; au dehors, elles se présentent sous la forme rectangulaire, coupées par un meneau horizontal, et sont ornées à la partie supérieure de simples baguettes; au second étage, l’une d’elles est surmontée d’une accolade dans laquelle sont inscrits le chef échiqueté et le cerf des Barthon ; cet écusson se voit encore, avec la variante losangée, sur une clef de voûte employée dans la construction d’un bâtiment moderne.
A chaque étage, du côté de la cour, se trouve un cabinet rectangulaire voûté en anse de panier et éclairé par une fenêtre étroite.
Toutes les portes intérieures sont à anse de panier, d’où l’on peut conclure que cette construction date de la fin du XVe siècle ou du commencement du suivant.
La tour est munie en partie de sa couronne de mâchicoulis.
Encore bien conservée au commencement du dernier siècle, un vandalisme pratique l’a vouée à une destruction prochaine, un de ses derniers propriétaires ayant vendu les bois et les matériaux à prendre au choix; ainsi toutes les poutres, toutes les pierres de grand appareil: marches d’escaliers, manteaux de cheminées, linteaux de portes et de fenêtres, ont été arrachés !