Généralités : Pierre NODÉ

Pierre Nodé, religieux minime né à Lussac, d’après les Mémoires de Robert du Dorat, n’est connu que par une brochure fort rare :

Déclamation contre l’erreur exécrable des maléficiers, sorciers, enchanteurs, magiciens, devins et semblables observateurs de superstitions, lesquels pullulent maintenant ouvertement en France ; à ce que recherche et punition d’iceux soit faite, sous peine de rentrer en plus grand trouble que jamais. — Plus les articles et erreurs touchant cette matière condemnez à Paris par la Faculté de théologie avec une très chrétienne et docte préface faicte à cette censure par M. Jehan Gerson et les docteurs de la dite Faculté, par F. Pierre Nodé, minime. — A Paris, chez Jean du Carroy, imprimeur, demeurant rue Saint-Victor, à l’Image Nostre-Dame,. 1578. — In-8 ; l’avertissement a 20 pages et la déclamation 78 pages*.

* Un exemplaire est conservé à la Bibliothèque nationale sous la cote 43299.

 

Cet ouvrage est dédié à un M. de Laval, qui avait contribué aux frais d’éducation et d’entretien de Nodé. En tête se trouve le sonnet suivant :

Las, qui te donnera (o ma chère France)
Ou un Jules César des devins le moqueur
Ou un Philippe roy qui d’un assuré cœur
Le charme méprisa, fait sur sa remembrance ?
Qui te fera, hélas ! jouir de la présence
D’un Constantin le Grand ou d’Henri l’empereur
Pour déchasser de toi la maligne fureur
Du Mommeur et sorcier qui te tient en souffrance ?
Soit ton bon roy Henry, un Daire persien,
Pour chasser la Pythie et le Magicien,
Et pour du bateleur chasser la folie.
Alors reverdira ton beau fleuron doré,
Par les tiens Dieu sera chastement adoré
Et cette impiété sera de toi bannie.
.                               F. P. Nodé, M.

La lecture de ce sonnet et celle des 28 chapitres de la déclamation permettent de se rendre compte que les sorciers n’ont été qu’un prétexte pour tonner contre les hérétiques, autrement les protestants ; la permission d’imprimer, signée de François Horace, docteur en théologie de la Faculté de Paris, est, en effet, du 18 mars 1578, c’est-à-dire que Pierre Nodé écrivait au lendemain de la signature de l’édit de Poitiers et de la déclaration de Bergerac, qui venaient de désavouer la Saint-Barthélémy et de donner de nombreuses libertés au parti protestant ; de là le ton général de l’ouvrage, qui ne se distingue pas des nombreuses publications analogues inspirées, à cette époque, par l’esprit de la Ligue, sous les titres divers d’Apologies, Déclarations, Complaintes, Protestations, etc.

Voici les sommaires des chapitres les plus intéressants, d’après l’exemplaire de la Bibliothèque nationale :

– 1. Les maux que nous endurons pour avoir délaissé Dieu et non obéir à l’Eglise ne sont que préparatifs par notre obstination à plus grands par la magie et sorcellerie qui est connue en France.
– 4. Que les sorciers, maléficiers, sont pires que tous autres hérétiques, plus à fuir et punir. ¬
– 6. Pourquoi le diable use comme un instrument, principallement de la femme, pour faire les plus grandes méchancetés, comme les sorcelleries.
– 12. Description des sorciers et sorcières, magiciens et hérétiques de ce temps-cy.
– 13. Les magiciens et sorciers se veulent faire semblables à l’agneau Jésus-Christ.
– 14. Il semble qu’Antechrist approche.
– 15. En quelles sortes les sorciers défendent de se marier où est parlé de leur énorme paillardise et d’user de viandes.
– 18. Petite digression savoir si le diable se fait publiquement quelque part adorer depuis la venue du Sauveur et de l’apparence de vraye religion dont plusieurs sont séduits.
– 21. Supplication aux seigneurs et magistrats de faire fort justice des sorciers et semblables.
– 22. Les arguments et conjectures par lesquels on cognoit les sorciers et devins, magiciens, et contre lesquels on doit user de toute rigueur de justice.
– 23. Qu’ils doivent être exécutés à mort selon toute loi et pour obvier à plusieurs maux autrement qu’ils feraient.
– 24. Que nous sommes pis que les payens si ne repurgeons pas le royaume et bientost de cette peste.
– 25. Qu’il faudroit bien tost mettre les inquisiteurs du roy pour en faire recherche et punition. ¬
– 26. Par l’exemple du passé instruits nous devons empêcher que les sorciers et magiciens s’élèvent contre le royaume.
– 27. Il faut empêcher que les hérétiques désespérés ne se joignent aux sorciers, ce qui pourroit advenir par les grands abus qui sont en France.
– 28. Prière concluant à ce qu’il plaise à Dieu de divertir ces malheurs avec advertissement de ce qui adviendra aux sorciers et à ceux qui n’en font punition, s’ils ne s’amendent.